Point de Bascule n’endosse pas le contenu de ce document. Il est archivé sur ce site uniquement à des fins de référence.
WARNING
Point de Bascule does not endorse the content of this document. It is archived on this website strictly for reference purposes.
Quand l’halal sonne faux
Adresse originale : http://www.journaldemontreal.com/2012/10/22/quand-lhalal-sonne-faux
Auteur : Stéphan Dussault
Référence : Journal de Montréal, 23 octobre 2012, p.11
Titre original : Quand l’halal sonne faux
Les fraudes sont nombreuses en raison d’une certification défaillante
PARIS, France | Pas une semaine ne passe en France sans qu’on découvre un produit faussement étiqueté halal. Comme quoi lorsqu’il y a de l’argent à faire, il y a de la fraude.
14 janvier 2011. Scandale chez le géant suisse Nestlé, qui doit retirer ses saucisses de volaille certifiées halal par la puissante mosquée de Paris. Un laboratoire vient de constater qu’ils contiennent du porc, produit qu’il est interdit de consommer dans la religion musulmane.
Trois mois plus tôt, c’est dans des bonbons certifiés halals qu’on a découvert de la gélatine de porc.
Et on ne compte plus l es boucheries halales de Paris qui affichent la certification religieuse sur une carcasse, mais dont toutes les autres dans l’arrière- boutique ne le sont pas, ou les restaurants halals qui servent de l’alcool et achètent leur viande n’importe où.
Gros marché
Pour le consommateur, le problème est qu’il est impossible de faire la différence entre un steak halal et un steak non halal. Car le fait de saigner un animal sans l’avoir étourdi ne change en rien le goût, la couleur ou la texture de la viande.
Et, avec environ cinq millions de musulmans en France, il s’ agit d’un énor me marché, qui fait saliver plusieurs entreprises. Il se vendrait pour plus de 7 G$ de viande et autres aliments halals en France, selon la firme de marketing Solis.
C’est pourquoi des géants comme Carrefour, le concurrent de Walmart en France, proposent depuis quelques années d’importantes sections de produits halals.
Fateh Kimouche dénonce ces fraudes depuis des années sur son populaire blogue Al- Kanz. Il a attaqué nombre de géants, dont Carrefour et PFK. Selon lui, le problème est que n’importe quel produit peut se prétendre halal.
Pas plus clair au Québec
En France comme ici, il n’existe aucun organisme central qui réglemente cette appellation.
Au Québec, «c’est très embryonnaire», résume Khadiyatoulah Fall, professeur à l’Université du Québec à Chicoutimi et spécialiste des questions musulmanes.
À Montréal, seule l’Association musulmane des commerces de viande halale (AMCVH) certifie une poignée d’abattoirs. L’imam Habib El Marzougui dit passer environ tous les deux mois pour jeter un oeil à l’abattoir : «On essaie de faire du mieux qu’on peut avec nos petits moyens».
Bien sûr, avec un montant symbolique de 30 $ par an pour les boucheries et 100 $ par an pour les abattoirs, on ne peut tout faire.
En France, on dénombre plusieurs organismes de certification, mais ils n’ont pas l a même valeur. Par exemple, l e sceau d’AVS ( À votre service) est parmi les plus respectés. Environ 150 inspecteurs visitent les abattoirs qui produisent de la viande halale. On commence aussi à s’intéresser aux restos. Cinq sont certifiés halal par AVS.
«Ça me coûte environ 500 euros par mois. Les inspecteurs d’AVS passent souvent trois fois par jour dans mon resto pour l’inspecter, mais, en revanche, des musulmans viennent de loin pour manger chez moi parce qu’ils ont l’assurance que c’est halal», dit Nabil Djedjik, propriétaire de deux restaurants Alambra en banlieue de Paris.
«De l’autre côté, dans les abattoirs certifiés par la mosquée de Paris, aucune vérification n’est faite. Personne ne passe dans les usines. Les industriels peuvent faire n’importe quoi. Et la mosquée charge de 3 à 5 ¢ du kilo pour cette certification bidon», déplore Fateh Kimouche.
Au bout du compte, même les musulmans sont devenus cyniques sur les questions d’halal.